Réponse de pro

“L’impôt au décès? Il n’y en aura pas, je donne tout à mes enfants.”

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« “Je donne tout à mes enfants, donc pas d’impôt.” Voici comment répondre à cette erreur fréquente. »

Non, transmettre à ses enfants ne fait pas disparaître l’impôt.

C’est une idée répandue : en donnant simplement ses biens à ses enfants, on évite l’impôt au décès.

Malheureusement, cette croyance est fausse dans la majorité des cas. Au Canada, ce n’est pas la transmission qui déclenche l’impôt, mais le décès lui-même.

Et même si vos enfants reçoivent vos biens, l’impôt doit être payé avant qu’ils en prennent possession — parfois avec des conséquences lourdes s’il n’y a pas eu de planification.

1. L’impôt au décès n’est pas une taxe successorale, c’est une “disposition présumée”

Contrairement à d’autres pays comme les États-Unis ou la France, le Canada n’impose pas directement la succession.

Mais il applique un principe appelé disposition réputée : au moment du décès, vous êtes réputé avoir vendu tous vos actifs à leur juste valeur marchande, même si vous ne les avez pas réellement vendus.

Cela déclenche l’impôt sur :
  • les gains en capital (résidence secondaire, chalet, placements non enregistrés, entreprise) ;
  • les REER ou FERR (imposition à 100 % sauf s’ils sont transférés au conjoint) ;
  • les actions, FNB, obligations, fonds communs, immeubles locatifs, etc.
Ce sont vos héritiers qui reçoivent le solde… après impôt.

2. Donner à ses enfants ne fait pas disparaître l’impôt

Même si vous rédigez un testament disant : « Tout va à mes enfants », l’Agence du revenu du Canada (ARC) appliquera quand même la disposition réputée au moment du décès.

Exemple :
  • Vous avez un chalet acheté 100 000 $ en 1995, qui vaut maintenant 400 000 $.
  • Au décès, vous êtes réputé l’avoir vendu à 400 000 $.
  • Gain en capital de 300 000 $, imposable à 50 % → 150 000 $ ajouté à votre revenu final.
  • Si votre taux marginal est de 45 %, cela représente environ 67 500 $ d’impôt à payer.
Peu importe que vos enfants reçoivent le chalet dans votre testament : l’impôt est dû avant.

3. Les REER et FERR sont entièrement imposables au décès (sauf exception)

Les REER et FERR sont imposés à 100 % au décès, à moins :

  • qu’ils soient transférés au conjoint survivant ;
  • ou à un enfant à charge financièrement en raison d’un handicap.

Sinon, le solde du compte est ajouté à votre dernier revenu.

Un REER de 250 000 $ peut facilement générer 100 000 $ d’impôt au décès.

4. La maison familiale est exonérée… mais pas le reste

La résidence principale bénéficie généralement d’une exonération complète du gain en capital.

Mais :

  • Si vous possédez deux résidences (maison + chalet), une seule est exonérée.
  • Les autres biens (placements, immeubles à revenus, entreprises) ne le sont pas.

D’où l’importance de faire une planification successorale proactive, surtout si vous souhaitez léguer des actifs complexes à vos enfants (ex. : immobilier, société par actions, REER importants).

5. Vos enfants pourraient devoir vendre pour payer l’impôt

Si vous avez un chalet, un immeuble locatif ou des placements importants, mais pas de liquidités, vos héritiers pourraient être forcés de vendre ces actifs… simplement pour payer l’impôt.

Cela peut provoquer :
  • la perte d’un bien familial ;
  • une vente précipitée à mauvais prix ;
  • des tensions entre enfants.
Une assurance vie bien conçue peut servir à payer l’impôt sans toucher aux actifs.

C’est une solution de planification successorale très répandue au Québec.

6. Sans testament, c’est encore pire

Sans testament, c’est la loi qui décide de la répartition de vos biens (Code civil du Québec), ce qui peut :
  • exclure un conjoint de fait ;
  • forcer une indivision entre enfants ;
  • compliquer la vente ou la transmission des biens ;
  • retarder les paiements d’impôt et accumuler des intérêts.

En conclusion

Transmettre vos biens à vos enfants ne vous évite aucunement l’impôt au décès.

Le fisc passe avant vos héritiers.

Et si vous n’avez pas prévu de liquidités (via assurance ou stratégie fiscale), ce sont vos enfants qui paieront la note… parfois à contrecœur.

Un bon plan successoral, un testament à jour et des outils comme l’assurance vie ou le gel successoral peuvent minimiser ou lisser l’impact fiscal.

Mais ignorer l’impôt, c’est l’assurer.

Sources :

  • Agence du revenu du Canada (ARC), Impôt sur les biens au moment du décès, 2024
  • Revenu Québec, Déclaration de revenus d’une personne décédée
  • Retraite Québec, Transmission des régimes enregistrés au décès, 2023
  • IQPF, Planification successorale – Guide du professionnel, 2023
  • Éducaloi, Le règlement d’une succession au Québec, 2024